Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les petits papiers de Stéphanie
Archives
20 mars 2013

Et le "Vilain Petit Canard" devint cygne....

Cécile Ladjali, Shâb ou la nuit, Actes Sud.

ladjali_jpeg"...rien n'est plus lent que la véritable naissance d'un homme...", cette citation de Marguerite Yourcenar ornait le marque-page que j'utilisais pendant la lecture de ce livre (il a peu servi d'ailleurs, tant je n'en ai fait que deux ou trois bouchées tout au plus !). Toujours est-il que je trouve cette réflexion tout à fait adaptée au livre de Cécile Ladjali.

Ce livre en effet parle de naissances. La toute première d'abord, le début de cette histoire en quelque sorte. Cécile Ladjali est née en 1971 dans une clinique Suisse. La situation est compliquée puisque la jeune maman est Iranienne, non mariée et complètement paniquée à l'idée d'élever son enfant seule. Elle décide donc de s'effacer pour offrir à son bébé un meilleur avenir. Cette petite fille porte alors le prénom "Roshan" ("soleil" en Persan), elle est confiée à une pouponnière où un couple de Français (Roger et Julie) l'adopte.

La vie offre (impose ?) à la petite Roshan une deuxième naissance. Elle sera désormais "Cécile", le prénom d'une Sainte aveugle, douloureuse ironie quand on pense qu'effectivement Cécile restera de longues années dans le noir, en ignorant tout de ses origines Iraniennes. Cécile, jolie brunette à la peau mate, est une vraie princesse des Mille une nuits. Impossible pourtant pour cette petite fille de s'identifier à sa mère adoptive qui elle, a tout de la beauté de Grace Kelly. Forcément, elle se sent un peu comme le Vilain Petit Canard. Difficile aussi pour Cécile de s'intégrer dans une histoire familiale dont on ne lui dit pas grand chose. Le papa Roger, s'appelle en fait Rabia. Né à Alger, il a "francisé" son prénom en 1948 losqu'il est venu s'installer à Paris. Quant à la maman, Julie, elle s'appelle en fait Jeannine, un prénom bien trop "banal" et "rustique" au goût de Roger pour une si jolie femme. Rien de plus simple donc : on change son prénom et hop, on oublie ses racines Algériennes, Iraniennes ou encore son enfance dans une famille modeste (Julie-Jeaninne a dû faire "bouillir" la marmite familiale très jeune et n'a pas fait d'études).

Bien sûr, ce n'est pas si simple, il y a de "l'inné" que l'on ne peut jamais oublier et sûrement pas avec un simple changement de prénom.  Ainsi Cécile mettra des années à sortir d'un malaise profond, sa "véritable naissance" sera longue et douloureuse, alourdie par le chagrin (son père et sa mère décèdent prématurément). Shâb ou la nuit est le fruit de ce long travail de réflexion, de réconciliation entre Roshan et Cécile.

Cécile Ladjali, ne prise guère l'autofiction. Elle explique de manière très simple cette "entorse" à ses convictions, je vous cite ce court passage :

"les auteurs avaient le loisir, le luxe inouï, de pouvoir dire ce que les autres ne parviendraient jamais à formuler. Ce livre, je voulus l'écrire aussi pour ceux qui n'avaient pas les mots."

Et effectivement, comme c'est toujours le cas avec les Grands Livres, Shâb ou la nuit a une portée universelle. Sa lecture ne peut que nous aider dans notre propre "véritable naissance". Avec ces quelques lignes hélas, je ne peux qu'effleurer imparfaitement tous les thèmes abordés par ce texte, alors je ne dirai plus qu'une chose : allez donc "z-y voir" par vous-mêmes, satisfaction garantie !

 

Publicité
Commentaires
Publicité