Un titre bizarre pour une belle histoire !

Isabelle Coudrier, Va et dis-le aux chiens, Fayard

Je vous propose un petit flash-back (rajeunir de quelques mois, c'est toujours bon à prendre non ?). Nous sommes en juin 2011. En libraire consciencieuse, je lis avec mes collègues le plus possible d' épreuves de la rentrée littéraire. Comme chaque année, le but du jeu est de présenter fin août une sélection de nos coups de coeur, la crème de la crème de toutes les nouveautés qui sortent à cette époque. Vous vous doutez bien que sur plus de 600 sorties, il y a forcément un écrémage monstrueux à faire !

Évidemment, pour être tout à fait honnête les très gros romans, d'auteurs inconnus, au titre peu accrocheur et à la couverture pas franchement engageante ne sont pas vraiment une priorité. Il faut bien reconnaître que Va et dis- le aux chiens, accumulait les handicaps !.. Cependant parfois un livre vous appelle (si si je vous assure, il suffit de tendre l'oreille.). J'ai commencé ainsi à le feuilleter et je ne l'ai plus quitté jusqu'à ce que je l'aie dévoré complètement.

La grande question est comment arriver à captiver son lecteur pendant 800 pages ? Cela en tout cas n'a pas paru inquiéter l'auteure, tant ce premier roman - totalement bluffant - semble avoir été écrit avec une étonnante facilité. 

Louis et Sylvia sont deux êtres torturés, à «fleur de peau» selon l'expression consacrée. Lui est critique de cinéma dans une revue confidentielle, quant à elle, sa grande passion sont les mathématiques (comme quoi on peut aimer un roman sans s'identifier à l'héroïne !). Le récit se passe sur une quinzaine d'années. Tous deux étudiants au moment de leur rencontre, ils approchent la quarantaine à la fin du roman. Au fil du temps, ils vont s'aimer (sans se le dire), se détester (en le montrant ostensiblement). Leur histoire d'amour est une suite de confrontations où quand l'un fait deux pas en avant, l'autre recule en même temps. Mais ce roman est bien plus qu'un roman d'amour, c'est presque un film documentaire où deux êtres sont disséqués et analysés, où on assiste à leurs compromis pour être heureux ou tout au moins pas trop malheureux. On note la fin de leurs désirs et illusions de jeunesse, la perte de certaines amitiés. Enfin bref, tout ce qui fait une vie. Le côté exceptionnel et admirable de l'affaire, est qu'il n'y a aucune fausse note et que ce roman «naturaliste», nous touche en plein coeur du premier mot jusqu'au dernier....

Je ne vais pas vous mentir, ce ne fut pas un succès spectaculaire... Mais s'il fallait uniquement juger la qualité des romans à l'aune de leurs ventes, le métier de libraire serait beaucoup plus simple mais aussi tellement triste ! Alors si par hasard un long week-end pluvieux et tranquille s'offre à vous, pensez à ce splendide roman. Enroulé dans votre couette, un thé à la main et une petite musique douce en toile de fond, je vous garantis un moment délicieux et rare.

Comments

[Flo-DK]

Bravo pour tous ces posts, c'est le paradis... Moi tu m'as convaincue sur ce roman-là, maintenant le titre m'intrigue = je l'ajoute à ma liste et je prépare la théière.